Il était simple

Jeannette Legland (1924)

Charles et moi avons grandi dans le même bourg. Mes parents étaient commerçants et ceux de Charles servaient dans un château où lui était cocher et elle cuisinière. Quand ils ont quitté le château ils sont devenus nos voisins. C’est là que nous nous sommes mariés, en continuant à travailler sur les marchés avec les parents.

Un jour Charles voit une affiche annonçant la venue à Nantes de Lanza del Vasto pour une conférence, il avait lu le Pèlerinage aux sources et était curieux de rencontrer l’auteur. Ce fut le coup de foudre ! Pour Charles tout ce que disait Shantidas sur la non-violence était évident. Il souhaitait entrer tout de suite dans la communauté, mais ce ne fut pas possible car elle était dans l’incapacité à ce moment-là de recevoir des familles. Si bien que nous sommes entrés en communauté beaucoup plus tard, une fois nos enfants élevés.

À cette causerie, j’avais trouvé Shantidas formidable ! On m’avait dit qu’il était un intellectuel et j’avais peur de ne pas comprendre, moi qui avais quitté l’école à 11 ans. En fait son discours était très clair. J’ai tout de suite été séduite et j’ai dit à Charles: « C’est la vérité. »

L’année suivante, nous l’avons invité à la maison. Le contact était excellent. Nous avons donc constitué un groupe d’amis à Nantes. Charles était plus instruit que moi, ayant été au petit séminaire jusqu’au baccalauréat, mais Shantidas m’a toujours paru simple. Je n’osais pas le dire, car les gens le disaient intellectuel, mais moi je le trouvais simple. Évidemment il avait une certaine tenue, mais cela ne me gênait pas, puisqu’il était simple. Et j’ai toujours aimé ceux qui se tiennent, plus que ceux qui se traînent !